Repenser l’organisation des grands groupes par le DevOps

par Gauthier Deschamps - Directeur Conseil
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Amazon, Facebook, Netflix… Le DevOps est au cœur du succès des leaders de l’innovation digitale. Loin des clichés du fonctionnement en mode start-up, il a hissé ces nouveaux modèles au rang de multinationales. Et il continue d’alimenter leur compétitivité tandis qu’elles font face aux challenges logistiques et managériaux qui ralentissent leurs concurrents.

Les groupes historiques auraient tort de rester à la traîne de leurs homologues “digital natives”. Le DevOps s’adapte d’autant mieux aux organisations complexes qu’il a été conçu pour éviter certains de leurs dysfonctionnements récurrents. Il peut révolutionner la production des solutions digitales au sein de n’importe quelle entreprise.

Et au-delà des projets IT, le DevOps propose une nouvelle façon de penser le collectif. Son adaptation aux grands groupes leur ouvre de nouvelles perspectives de compétitivité qui dépassent largement la sphère des outils SI.

Les principes et les méthodes du DevOps sont accessibles à n’importe quel professionnel du digital. Le véritable challenge construire à concrétiser le changement au plus près du terrain, en banalisant les contraintes liées au déploiement du changement. Apporter le changement au plus vite pour faire évoluer ou corriger une situation devient un « must have » Les organisations en transformation devront faire émerger des solutions inédites pour adapter de nouveaux principes de fonctionnement à leurs faiblesses existantes.

1. Standardiser la production pour se recentrer sur l’humain

Les compagnies DevOps natives bénéficient de leur position de second movers. Le DevOps vise en fait soit à éviter, soit à résoudre les conflits classiques de la construction de logiciels. Elle automatise la production pour consacrer plus de ressources aux enjeux spécifiques et humains de l’entreprise.

Elle s’attaque d’abord aux silos qui persistent entre équipes de développement (“Dev”) et d’exploitation des logiciels (“Ops”, pour “opérationnels”).

Celles-ci sont trop souvent piégées par un conflit d’intérêt en apparence indépassable. Les développeurs cherchent à réduire le Time to Market ; et les équipes opérationnelles doivent garantir la stabilité du SI. Elles contrôlent donc les évolutions des outils, et attribuent les incidents de production à la mauvaise qualité du code. Les développeurs blâment quant à eux les opérationnels pour les retards de production.

Comme son nom l’indique, le DevOps dépasse cette opposition. Il aligne les missions de court terme des deux métiers sur un objectif de long terme : la création de valeur de l’entreprise. Pour ce faire, il mobilise 3 principes d’action :

  • La construction d’une culture de collaboration entre développeurs, opérationnels, et toutes parties prenantes aux projets SI, avec le support d’un outillage partagé. Cette proximité renforce la performance collective. Par exemple, les opérationnels remontent plus efficacement les erreurs grâce à leur meilleure compréhension des besoins métiers des développeurs.
  • Une gouvernance responsabilisante et collective, partagée entre développeurs et opérationnels. Chaque équipe est responsable de son produit quelle que soit sa participation dans la phase de construction (You build it, You run it). L’interactivité des compétences couvre l’ensemble du cycle de vie du produit, grâce à un management horizontal et à des rôles d’animation dédiés. Au Product Owner et au Scrum Master introduits par les méthodes agiles, s’ajoutent :
    • un Ops Master, qui porte la communication auprès des équipes Ops
    • une DevOps Squad qui arbitre les décisions de la conception à la livraison du produit.
Par ailleurs, les réunions agiles sont complétées par un Run Flash Info hebdomadaire de 20 minutes, au cours duquel développeurs et opérationnels résolvent les dysfonctionnements du Run (incidentologie, retards, etc).
  • L'automatisation du développement et de la production des logiciels, supportée par la convergence des outils. Cela passe notamment par un changement de perspective : les équipes cessent de raisonner en termes de portefeuille, pour se concentrer sur le produit dont elles sont responsables. L’objectif est le déploiement continu : l’application doit pouvoir être envoyée en production à tout moment. Méthodes de coding, de livraison, de tests, et même de contrôle qualité sont standardisées et automatisées. Les itérations sont plus régulières, plus légères, plus proches des attentes clients, et bien moins risquées que des mises à jour massives. Bien sûr, certaines se révèlent défectueuses ; mais le rythme d’adaptation rapide permet de gérer l’échec avec réactivité et pragmatisme.

Sans mesure des résultats, impossible de comprendre les causes d’un échec – ou de mesurer la réussite de nouvelles méthodologies. Des KPI ciblés contrôlent la concrétisation de ces principes d’action, autour de 5 axes de performance :

  • la sécurité produit : évaluation des risques, tests d’intrusion…
  • la vélocité : Time to Market…
  • la productivité : nombre d’applications en déploiement automatisé, taux de réussite des déploiements…
  • la qualité : ratio de couverture des exigences, volume d’incidents…
  • la collaboration : enquêtes de satisfaction…

Le tableau de bord DevOps pilote et contribue à la transformation sur le terrain : les équipes projets sont collectivement responsables de leurs performances.

2. Le DevOps, effet de mode ou tendance de fond ?

En quelques principes de fonctionnement empreints de bon sens, le DevOps annonce la révolution de la production de solutions logicielles. Qui aurait cru qu’il était si simple de supprimer les blocages techniques et collaboratifs qui freinent l’agilité des grands groupes ?

La réalité sur le terrain s’avère évidemment plus complexe. De nombreuses entreprises Fortune 500 ont consenti à de lourds investissement dans l’automatisation de la production de leurs outils, sans obtenir les résultats attendus.

D'autres concrétisent des succès limités à des périmètres pilotes, mais ne parviennent pas à généraliser leurs nouvelles méthodes de travail.

Un nombre plus élevé encore se déclare déçu de la transformation digitale. Le DevOps leur apparaît comme un nouvel avatar des doctrines dans lesquelles elles ont investi à perte. Si les méthodes agiles, le Lean, ou encore le Kanban ne les ont pas rendues plus compétitives, pourquoi le DevOps serait-il différent ?

L’explication de ces échecs est aussi simple que ses implications sont subtiles. Le déploiement du DevOps ne saurait se limiter à quelques mesures buzzwords mal adoptées par les équipes.

Le succès de “licornes” telles que Google ou Netflix tient à l’ensemble de leur modèle organisationnel. Elles partagent une organisation plate, constituée de petites équipes polyvalentes et semi-autonomes, responsables de leurs missions de A à Z. En d’autres termes, elles appliquent les principes et la culture DevOps à l’ensemble de leurs opérations – si étendues soient-elles.

Les dirigeants s’engagent volontiers dans la transformation de leurs méthodes de travail. Mais pour porter ses fruits, elle doit s’accompagner de la transformation de leur organisation et de leur culture d’entreprise.

Tel est le challenge des grands groupes historiques : ils ne peuvent pas être à la fois traditionnels et agiles. Pour rester compétitifs, ils doivent faire évoluer la culture et l’organisation qui ont fait leur succès.

Ils doivent cesser de se considérer comme, par exemple, “une banque qui adopte des méthodes agiles”. Ils doivent devenir “une société technologique qui opère dans le secteur bancaire”.

3. La décision collective, meilleure alliée de la transformation sur le terrain

Une fois cette réalité admise, le principal frein à la transformation des grands groupes tient à la maturité de leur organisation.

Les entreprises qui sont déjà parvenues à rendre leurs organisations plus agiles ont une longueur d’avance.

Le DevOps approfondit la vision et les techniques des méthodes agiles. Et il s’inspire du Lean dans ses meilleures pratiques de gouvernance et d’organisation logistique. La création de valeur pour l’entreprise, objectif fédérateur des équipes DevOps, passe par la mise en place de cycles d’amélioration continue, la suppression des tâches sans valeur ajoutée… Un groupe ayant gagné en maturité et en souplesse grâce à de précédents changements n’aura qu’à poursuivre sur sa lancée.

La transformation digitale est un processus continu. Et malgré leurs efforts, la plupart des grands groupes historiques présentent un ou plusieurs des problèmes suivants :

  • Des méthodes de production et de gestion “sur-mesure” pour chaque outil ;
  • Un suivi défaillant des KPIs, dû à une mauvaise remontée des informations, à un problème de définition ou de pertinence de l’indicateur… ;
  • Un fonctionnement en silos et sous-silos rigides ;
  • Et bien sûr, la réticence au changement.

Ces difficultés requièrent des réponses ciblées, construites en fonction de la situation particulière de chaque entreprise. Cependant, les experts de la transformation agile ont identifié un levier qui les impacte toutes : la gouvernance collective. Pour que la transformation dépasse un simple rapprochement informel entre collègues, les instances d’auto-organisation doivent jouir d’un pouvoir décisionnel.

Ce sont ainsi les Core Teams qui animent véritablement la démarche DevOps au cœur du groupe. Ces équipes de réflexion, appuyées sur des coachs DevOps, sont constituées d’une dizaine de représentants métiers hétérogènes. Elles mènent une réflexion d’envergure sur la transformation du modèle de l’entreprise. Elles se concentrent notamment sur :

  • la stratégie de déploiement de l’agilité et la sensibilisation des collaborateurs,
  • la transformation de la gouvernance et des processus existants,
  • l’identification des outils nécessaires à la transformation,
  • et l’accompagnement du changement auprès des collaborateurs.

Ces sujets diffèrent parfois de la vision managériale. Mais il est essentiel que la Direction de l’entreprise accorde aux conclusions de la Core Team une portée décisionnelle suivie d’applications concrètes. L’innovation bottom-up ouvre ainsi la voie à une organisation plus plate et agile.

Le DevOps prépare les grands groupes aux méthodes de travail du 21e siècle : automatisation de la production, aplanissement hiérarchique, souplesse culturelle, gestion par le collectif. Les grands groupes ne restent pas seuls face à ce défi de taille. Des experts de la transformation agile se tiennent prêts à les accompagner dans l’adaptation de leur organisation et de leur culture.

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