Handitutorat, un programme gagnant-gagnant

par Philippe Baconnet - Responsable de la Mission handicap de Sopra Steria
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Depuis son lancement en 2013, le programme Handitutorat, qui vise à faciliter l'accès de lycéens en situation de handicap à l'enseignement supérieur, a montré son efficacité. Exemple avec le binôme Mathieu/Pierre-Louis. 

Ils se présentent côte à côte et clairement, la confiance est là. Mathieu et Pierre-Louis sont « coéquipiers », dit Mathieu. Ils s'entendent bien et partagent une passion pour l'informatique et les jeux vidéo... Le premier a 21 ans et est étudiant à l'ISIMA, une école d'ingénieurs spécialisée en informatique, à Clermont-Ferrand, et a choisi de devenir handituteur. Le deuxième, 18 ans, est élève en terminale au lycée La Fayette de la ville. En situation de handicap, il est accompagné dans le cadre du programme Handitutorat de Sopra Steria. Lancé en 2013 par l'entreprise de services numériques, l'initiative vise à faciliter l'accès de lycéens en situation de handicap à l'enseignement supérieur, grâce à l’accompagnement sur-mesure d’étudiants en école d’ingénieurs. 

« L'idée de constituer des binômes étudiants/lycéens qui, issus de la même génération, partagent les mêmes intérêts et les mêmes rêves, nous a semblé être la solution idéale pour répondre aux objectifs du programme Handitutorat. Nous avons de plus en plus de volontaires parmi les étudiants. Les jeunes d'aujourd'hui sont très sensibles aux questions sociétales et cherchent à s’engager dans des actions porteuses de sens. », indique Philippe Baconnet, responsable de la Mission handicap de Sopra Steria. En effet, le programme porte ses fruits. Depuis son lancement, quelque 400 lycéens ont été accompagnés. 

Un programme de sensibilisation au handicap 

Grâce à des partenariats avec des écoles d'ingénieurs (l'ISIMA à Clermont-Ferrand, CentraleSupélec Paris, CPE Lyon, l'ENSEIRB-MATMECA à Bordeaux, l'Enac à Toulouse, l'INSA à Rennes, CentraleSupélec Rennes, l'Efrei à Paris...), le programme Handitutorat sensibilise et forme chaque année des dizaines d’étudiants à la prise en compte du handicap. Une fois en action, ils sont accompagnés par un manager de l'entreprise (un référent), tout au long de leur mission sur l’ensemble de l’année scolaire. 

En outre, dans le cadre des accords d'entreprise sur le handicap, Sopra Steria soutient un programme de bourses qui permet le financement de mesures de compensation nécessaires à la poursuite d'études, en partenariat avec la Fédération nationale étudiante 100 % Handinamique. « Plus d’une trentaine de bourses sont attribuées chaque année. Nous avons par exemple financé la prise en charge d’une traduction en langue des signes des cours de première année de BTS d’un jeune sourd signant. Ce besoin de compensation représentait un budget trop lourd pour la famille et un frein certain à l'accès à l'enseignement supérieur pour cet étudiant. », poursuit Philippe Baconnet

Nouvelle confiance, nouvelles ambitions   

Depuis fin décembre 2022, Pierre-Louis est donc accompagné par Mathieu, qu'il voit deux heures par semaine, ou deux fois une heure, selon leurs agendas. En tout cas, le référent de Mathieu a conseillé ce rythme et l'étudiant ingénieur s'y tient. « Je préfère deux heures d'un coup, relève Pierre-Louis, cela me force à me concentrer, ce qui était l'une de mes difficultés dans mes études. » Depuis l'arrivée de Mathieu dans sa vie de lycéen, les choses se sont largement améliorées. « Tout va bien maintenant », assure d'ailleurs Pierre-Louis dans un sourire. Cela n'a pas toujours été le cas. « Mes notes n'étaient pas terribles et le corps enseignant m'a parlé du programme Handitutorat », poursuit-il. Il a sauté sur l'occasion. Parfois, il a besoin de l'aide de Mathieu pour repasser ses cours et s'assurer qu'il maîtrise la matière. Et cette nouvelle confiance en lui l'incite à redoubler d'efforts. « Cela m'apporte un confort psychologique que je n'avais pas avant, même si mes parents me soutiennent aussi. », dit-il. De quoi le pousser à penser qu'il aura son bac sans difficultés, mais aussi, et surtout, à « libérer » ses ambitions, dit-il. 

L'examen réussi, intègrera-t-il la même école d'ingénieurs que Mathieu ? « Peut-être, répond Pierre-Louis, ou alors une autre, mais en tout cas, ce sera dans l'informatique. Tout m'intéresse dans ce domaine, je définirai ce que je veux faire un peu plus tard. » Mais d'ores et déjà, le champ des possibles est ouvert. 

 Mathieu, lui, s'intéresse, en plus des jeux vidéo, à la réalité virtuelle, et voudrait bien en faire son métier, pour entraîner des salariés à des tâches délicates ou sur des machines dangereuses, par exemple. « Ce serait un apport à la société », avance-t-il. C'est d'ailleurs cette notion qui l'a incité à devenir handituteur, « pour faire la différence ».  

Dans ce domaine, Claire Desroches, responsable Diversité, Egalité et Inclusion à CPE Lyon, qui participe au programme Handitutorat depuis ses débuts, a de belles histoires à raconter. « Nombreux sont les étudiants handituteurs qui restent en contact avec les lycéens handitutorés au-delà de la période pour laquelle ils se sont engagés, et les suivent dans leurs études supérieures », dit-elle. L'une des élèves de cette école d'ingénieurs spécialisée en chimie et en sciences du numérique a même choisi de se spécialiser dans l'accompagnement de jeunes aveugles. « Elle a eu le déclic après son tutorat et a décidé d'en faire son métier », explique-t-elle. De nouvelles vocations, donc, pour les handituteurs comme pour les handitutorés. Autant dire un programme gagnant-gagnant pour la société. 

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